« La non-occultation de ce qui est suit toujours un chemin de dévoilement. L’homme dans tout son être est toujours régit par le destin du dévoilement. Mais ce n’est jamais la fatalité d’une contrainte. Car l’homme, justement, ne devient libre que pour autant qu’il est inclut dans le domaine du destin et qu’ainsi il devient un homme qui écoute, non un serf que l’on commande.
L’essence de la liberté n’est pas ordonnée originellement à la volonté, encore moins à la seule causalité du vouloir humain.
La liberté régit ce qui est libre au sens de ce qui est éclairé, c’est-à-dire dévoilé. L’acte du dévoilement, c’est-à-dire de la vérité, est ce à quoi la liberté est unie par la parenté la plus proche et la plus intime. Tout dévoilement appartient à une mise à l’abri et à une occultation. Mais ce qui libère, le secret, est caché et toujours en train de se cacher. Tout dévoilement vient de ce qui est libre, va à ce qui est libre et conduit vers ce qui est libre. La liberté de ce qui est libre ne consiste, ni dans la licence de l’arbitraire, ni dans la soumission à de simples lois. La liberté est ce qui cache en éclairant et dans la clarté duquel flotte ce voile qui cache l’être profond (das Wesende) de toute vérité et fait apparaître le voile comme ce qui cache. La liberté est le domaine du destin qui chaque fois met en chemin un dévoilement. »
Martin Heidegger, « Essais et conférences », « La question de la technique », pp. 33-34, Tel Gallimard.