« En ce qui concerne les Védas, qui constituent la base fondamentale de toute la tradition en question, il serait inexact de parler d’une « religion » ou d’une « philosophie ». Déjà le terme Véda fait allusion à une doctrine basée, non pas sur la foi ou sur la « révélation », mais sur la connaissance au plus haut sens du terme, justement assimilée, par analogie, au fait de voir. Les Védas furent « vus » : ils furent vus par les
rshi, par les « voyants » des premiers âges. Pendant toute la tradition, le contenu des Védas ne fut jamais considéré comme une « foi », mais bien comme une « science sacrée ».
C’est d’ailleurs une vraie plaisanterie que de considérer dans les Védas, comme le font plus d’un orientaliste, l’expression d’une « religion purement naturaliste ». Certes, il est toujours possible d’y trouver des scories, tout comme ailleurs, résidus qui proviennent d’infiltrations éxogènes, particulièrement sensibles dans l’Atharva-Veda, par exemple. Mais ce que reflète la partie essentielle et la plus antique des Védas, c’est un stade cosmique de l’esprit indo-aryen. Il ne s’agit point de théories ou de théologies, mais d’hymnes, dans lesquels se reflète et grandit une conscience encore attachée au monde et à la réalité métaphysique, en sorte que les divers « dieux » des Védas, plus que des images religieuses, sont des projections de l’expérience de significations et de forces directement perçues, soit dans l’homme, soit dans la nature, soit au-delà de la nature, dans une impétuosité cosmique, héroïque et « sacrificielle », dans un ensemble libéré et, pour ainsi dire, « triomphal ». »
Julius Evola, « La doctrine de l’éveil », Lieu historique de la doctrine de l’éveil.