« On pourrait cependant objecter : « Tout ceci est bel et bon mais que devient, avec de telles idées, la latinité ? Est-ce que, par hasard, nous ne serions pas des méditerranéens et des Latins ? L’origine de notre peuple et l’inspiration de notre civilisation ne sont-elles pas, comme on l’admet universellement, latines ? »

Ce mythe latin – sinon sous la forme (dont de récents événements ont démontré la solidité très relative) de la « fraternité latine » et de la fondamentale unité d’esprit et de sensibilité des peuples « latins », du moins au sens de la « latinité » de notre civilisation italienne – ce mythe latin garde encore sa vigueur dans de nombreux milieux, notamment chez les gens de lettres et les intellectuels, et n’est pas étranger à l’inspiration d’une bonne partie de l’enseignement tel qu’il est encore délivré aujourd’hui dans les écoles. En se réclamant d’un tel mythe, on insiste surtout sur l’antithèse qui, malgré tout, existerait entre notre peuple et les autres et, par conséquent, sur l’impossibilité d’une entente qui ne serait pas simplement dictée par de communs intérêts politiques.

Or, ici encore, nous sommes confrontés à une grossière équivoque née de l’utilisation passive de phrases toutes faites et de formules que l’on ne se donne pas la peine d’approfondir. Car, à la fin, qu’entend-t-on exactement par « latin » ? Et à quel domaine se réfère-t-on lorsqu’on emploie une telle expression ?

Ce n’est pas par hasard si nous avons souligné que le mythe latin est avant tout l’enfant chéri de milieux d’homme de lettres et d’intellectuels. En réalité, tel qu’il est utilisé couramment, le terme « latin » (au même titre que celui de « civilisation latine ») n’a de sens qu’à condition de se référer à un plan esthétique, « humaniste » et littéraire – c’est à dire au monde des arts et de la culture au sens le plus extérieur du terme. Ici, la « latinité » est plus ou moins synonyme d’élément « roman » : en d’autres termes, il s’agit de reflets que certains peuples ayant jadis appartenu à l’Empire Romain conservèrent, sur le pan culturel, de l’action formatrice de la Rome antique – au point d’adopter sa langue, la langue latine.

Si l’on voulait cependant se donner la peine d’examiner d’un peu plus près les choses, on s’apercevrait bien vite que cette « latinité », simple écho de l’antique civilisation gréco-romaine, est quelque chose de superficiel. Nous dirions presque qu’il s’agit d’un vernis qui s’efforce vainement de recouvrir des différences aussi bien ethniques que spirituelles qui, comme l’histoire nous l’a montré hier encore, peuvent même se traduire par des antagonismes sans merci.

Comme nous le disions, cette unité ne subsiste que dans le monde des lettres et des arts, du moins en vertu d’une conception typiquement « humaniste » de celui-ci et qui se réfère à un monde pour lequel la Rome antique, héroïque et catonienne ne dissimulait pas son mépris. Un autre domaine où cette unité subsiste est celui de la philologie, bien que cette unité soit remise en question depuis que l’on a établi de façon indiscutable l’appartenance de la langue latine au tronc général des langues aryennes et indo-germaniques ; c’est, par ailleurs, un fait établi que, au niveau sinon des vocables, du moins de l’articulation et de la syntaxe (les déclinaisons, notamment), l’antique langue latine est plus proche de l’allemand que des langues latines romanes. De sorte que, pour parler sans fioritures inutiles, cette « latinité » tant vantée s’avère ne concerner aucune des formes réellement créatrices et originelles propres aux peuples sensés en relever. Elle ne concerne qu’une façade – non pas l’essentiel, mais l’accessoire. Ce n’est pas tout : il faudrait aussi revoir une bonne fois pour toutes, d’un point de vue raciste, la signification de ce monde classique « gréco-romain » dont dérive soi-disant la latinité et pour lequel les « humanistes » nourrissent un culte quasi superstitieux.

Ce n’est pas ici le lieu de traiter ce problème : nous dirons simplement que ce « classicisme » est un mythe du même tonneau que celui de la philosophie des Lumières, laquelle voudrait faire croire que ce n’est qu’avec les « conquêtes » de la Renaissance et leurs conséquences, l’encyclopédisme et la Révolution française, que serait née, après les « ténèbres » du Moyen-Age, la « véritable » civilisation. Dans le mythe « classique » lui aussi on sent la même mentalité esthétisante et rationaliste.

Qu’il s’agisse de Rome ou de la Grèce, ce que la plupart des gens considèrent comme « classique », c’est en fait une civilisation qui, sous plus d’un aspect – en dépit de sa splendeur apparente, bien faite pour séduire une race « aphrodisienne » -, nous apparaît, à nous, comme déjà décadente : il s’agit de la civilisation qui naquit lorsque le cycle précédent – la civilisation héroïque, sacrale, virile et proprement aryenne de l’Hellade et de la Rome des origines – avait déjà amorcé sa courbe descendante.

Ce qu’il convient, par contre, de noter, c’est que si l’on se reporte à ce monde des origines bâti par des races « solaires » et « héroïques », le terme « latin » revêt une toute autre signification – signification qui inverse carrément le mythe auquel nous faisions allusion au début. Nous nous bornerons ici à évoquer quelques résultats des recherches actuellement en cours à propos des traditions de l’Italie préhistorique et préromaine. Originellement, le terme « Latins » désignait une ethnie dont la parenté raciale et spirituelle avec le groupe des peuples nordico-aryens n’est contestée par aucun auteur sérieux. Les Latins constituaient un rameau, ayant poussé jusqu’à l’Italie centrale, de cette race pratiquant le rite de la crémation des morts qui s’opposa à la civilisation oscosabellienne caractérisée, elle, par le rite funéraire de l’inhumation – or, la relation entre les civilisations « inhumatrices » et les civilisations méditerranéennes et asiatico-méditerranéennes (pré- et non indo-européennes) est elle aussi incontestable. Et ces Latins occupèrent certaines régions de l’Italie bien avant l’apparition des Etrusques et des premiers Celtes.

Parmi les traces laissées derrières elles, quasiment comme un sillage, par les races dont dérivèrent les Latins, on peut notamment citer celles découvertes récemment dans le Val Camonica. Eh bien, ces traces correspondent de façon significative aux traces préhistoriques des races aryennes primordiales, aussi bien nordico-atlantiques (civilisation franco-cantabrique de Cromagnon) que nordico-scandinaves (civilisation de Fossum). Nous y trouvons les mêmes symboles d’une spiritualité « solaire », le même style, la même absence de traces d’une religiosité tellurico-démétrienne, qui sont au contraire propres aux civilisations méditerranéennes non aryennes ou à la décadence aryenne (Pélasges, Crétois, etc. ; en Italie : Etrusques, civilisation de la Maiella, etc.).

Ce n’est pas tout : on constate également des affinités antre ces traces laissées dans le Val Camonica et la civilisation dorienne propres aux races qui, venues du Nord, s’établirent en Grèce et créèrent Sparte, et caractérisées par le culte d’Apollon conçu comme dieu solaire hyperboréen. En réalité, comme l’établissent les travaux d’Altheim et de Trautmann, cette migration des peuples dont dérivèrent les Latins et dont la conclusion devait être, en Italie, la fondation de Rome, cette migration ressemble en tous points à la migration dorienne qui, en Grèce, donna naissance à Sparte. Rome et Sparte sont donc des manifestations correspondant à des races du corps et de l’esprit semblables qui, à leur tour, sont parentes de celles spécifiquement nordico-aryennes.

Mais quand on évoque la première romanité et Sparte, il s’agit d’un monde de forces à l’état pur, d’un ethos sans faiblesse, d’une maîtrise de soi incontestablement virile et dominatrice – monde que l’on retrouverait difficilement dans la civilisation dite « classique » qui lui succéda et dont on voudrait faire dériver la « latinité » et l’« unité de la grande famille latine ».

Si, par contre, on emploie le terme « latin » en se référant aux origines, on constate un retournement complet de la thèse de la « latinité ». Originellement, cette dernière – qui correspond à ce que la grandeur romaine recelait de vraiment aryen – se rapporte à des formes de vie et de civilisation non pas opposées, mais au contraire semblables à celles que les races nordico-germaniques elles aussi devaient plus tard manifester en face d’un monde en décadence qui, plus que latin, était désormais « roman » et plus ou moins bysantinisé. Sous son vernie tout extérieur, la supposée « latinité » renfermait, au contraire, des forces hétérogènes capables de ne former un tout qu’aussi longtemps qu’elles se trouvent simplement confrontées au dérisoire « monde des lettres et des arts ». »

Julius Evola, « Éléments pour une éducation raciale ».

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